[Jean-Sébastien Bernatchez] Je veux vous entendre sur un extrait en particulier de votre essai Les filles en série. Des Barbies aux Pussy Riot. C’est vers la fin, quand vous vous êtes intéressée à des personnages de fiction qui se révoltaient contre leur position de fille-objet. Vous écriviez et je vous cite: «Que leur puissance réside dans le refus d’une posture de victime prescrite par le discours qui, suivant une logique perverse, reconnaît la violence faite aux femmes, mais non pas dans le but de les protéger, mais dans le but de les faire taire.» Qu’est-ce que vous vouliez dire?
[Martine Delvaux] En fait ce serait le syndrome du Petit chaperon rouge. On raconte toujours l’histoire du Petit chaperon rouge, en particulier aux petites filles, pour les mettre en garde contre le Grand méchant loup. Faisant ça, on enjoint les femmes et les filles à faire attention sans arrêt: à rester chez elles, à se protéger, à faire attention le soir, à regarder autour d’elles, à verrouiller leurs portes comme ça a été suggéré pour les étudiantes de l’Université Laval. L’odieux retombe sur les épaules des femmes plutôt qu’inverser la vapeur. […]