Francis Dupuis-Déri : “être proféministe doit comporter des coûts, et pas seulement des avantages”

Comment décririez-vous les effets du patriarcat dans votre collaboration sur des bases féministes ?

Mélissa Blais : Pour moi, nos rapports avec les médias démontrent la persistance des dynamiques patriarcales, puisque Francis reçoit des invitations des médias bien plus souvent que d’autres femmes féministes, moi y compris, pour expliquer son engagement et présenter son expertise. Et on prétend chaque fois que c’est très original de permettre à des hommes de s’exprimer sur ces questions.

Francis Dupuis-Déri : En effet, j’ai été sollicité pour parler de tant de sujets sur lesquels je n’ai pas écrit une ligne : l’avenir du féminisme, les femmes en politique, la non-mixité féminine, les sports féminins, le métier de secrétaire et même le « plafond de verre », douce ironie! Lorsque je refuse de telles invitations et propose des expertes, on m’explique qu’il serait plus intéressant d’entendre un homme sur ces sujets. On me demande même mon avis sur des thèmes d’expertise de Mélissa, les violences contre les femmes et l’attentat antiféministe du 6 décembre, alors qu’on ne lui demande jamais d’intervenir sur des sujets dont je suis spécialiste. Il y a donc un avantage à être un homme proféministe, même lorsque les médias s’intéressent aux femmes, et c’est très problématique. […]

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Les bonnes planques de l’antiféminisme

Grâce à l’essai [Le boys club] de Martine Delvaux, professeure canadienne, le sujet des boys clubs fait l’actualité, féministe, depuis quelques semaines: elle y analyse ces groupes d’hommes, souvent riches, blancs, hétéros, présents partout dans les structures de nos sociétés. Clubs non-mixtes, conseils d’administration, réunions politiques… Des lieux de pouvoir où ces groupes d’hommes se réunissent et prennent des décisions avantageuses à leur égard, et souvent défavorables aux femmes. Antiféministes, ces boys clubs?

Mélissa Blais tempère. «Si l’antiféminisme cherche à créer des espaces exclusivement masculins, le boys club n’est pas nécessairement antiféministe. Ce dernier est une posture politique visant à reproduire cette division sociale des sexes, qui identifie les féminismes comme un problème. Un boys club reproduit une vision sociale inégalitaire des sexes, la division sexuelle du travail, une hiérarchie de valeurs entre travail masculin et féminin… C’est de l’entraide entre hommes, du copinage : la reproduction de leurs avantages et privilèges par une posture masculine traditionnelle.» Cette posture masculine n’épargne pas les mouvements progressistes de gauche. Parce que « ces organisations sont aussi contrôlées par des hommes blancs, hétéros pour la plupart. Indirectement, ils reproduisent un privilège, celui de prioriser la lutte qui défend leurs propres besoins et intérêts. Cette reproduction des clivages, à l’intérieur des assemblées de gauche, permet d’expliquer pourquoi le féminisme passe toujours au second plan, tout comme l’antiracisme. Il s’agit quand même bien, dans les faits, d’articuler dans leur stratégie une sorte d’antiféminisme », poursuit la professeure, qui remarque au passage que le mouvement féministe reproduit aussi cette priorisation «d’une lutte que nous espérons universelle», mais qui invisibilise les inégalités raciales et sociales et laisse donc des femmes à la marge.

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Attentat masculiniste de Toronto

Mélissa Blais est québécoise, chargée de cours à l’Institut de recherches et d’études féministe de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Elle a travaillé sur la mémoire de la tuerie de l’Ecole polytechnique de Montréal, survenue le 6 décembre 1989, pendant laquelle Marc Lépine avait tué 14 femmes avant de se suicider. Elle a aussi co-écrit Le mouvement masculiniste au Québec: l’antiféminisme démasqué. […]

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«En classe!»: l’antiféminisme

Pendant tout le cours, qui sera livré sans aucun PowerPoint et qui se terminera à 17 h, pas une minute plus tôt, les étudiantes resteront entièrement concentrées sur la matière présentée par le prof. Il faut dire qu’il sait de quoi il parle. Chercheur à l’Institut de recherches et d’études féministes (IREF), Francis Dupuis-Déri s’intéresse aux masculinistes depuis plusieurs années. Il a même codirigé, avec sa collègue chargée de cours et doctorante en sociologie Mélissa Blais (qui donne le même cours à un autre groupe), un ouvrage qui fait référence sur le sujet: Le masculinisme au Québec: l’antiféminisme démasqué (Remue-ménage).

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Recension | Le mouvement masculiniste au Québec. L’antiféminisme démasqué

Cet ouvrage collectif a suscité de nombreux débats publics et académiques lors de sa première parution en 2008. Les discussions avaient alors surtout porté sur la définition du masculinisme comme mouvement social, sur son étendue dans certains cercles académiques et sociaux légitimes et sur les menaces qu’il faisait peser sur les femmes et le mouvement féministe québécois. […]

Le livre de Blais et Dupuis-Déri demeure toutefois une référence incontournable pour connaître le mouvement masculiniste québécois et pour se convaincre de l’importance de faire des recherches empiriques approfondies sur cette question. […]

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L’arbre qui cache la forêt

Avec Francis Dupuis-Déri, enseignant en sciences politiques à l’UQAM, elle [Mélissa Blais] a lancé plus tôt cette année une version remaniée de l’ouvrage collectif Le mouvement masculiniste au Québec: l’antiféminisme démasqué aux Éditions du remue-ménage. Pour elle, il ne fait pas de doute que lorsque l’on porte notre attention de manière exclusive sur ce blogueur [Roosh V], on peut oublier de mettre en lumière «le reste de la forêt» dont les divers arbres. Ceux-ci, au discours en apparence beaucoup plus respectable, mettent en péril les fragiles acquis qu’ont obtenu les femmes au cours des dernières années.

Les stratégies de ces masculinistes ou de ces «hoministes» sont insidieuses. Il y a de leur part une récupération de problématiques sociales telles que le décrochage scolaire des garçons, le suicide des hommes, la garde d’enfants dans les cas de séparation ou de divorce ou encore une présumée symétrie de la violence dans les cas de violence conjugale. Loin de l’idée de vouloir ignorer la souffrance des hommes, Blais estime qu’il ne faut pas se centrer exclusivement sur celle-ci et occulter celle des femmes. En effet, ces militants – car leur discours s’inscrit dans un mouvement – basent leur argumentaire sur la croyance erronée que les hommes seraient en crise en raison des femmes et des féministes. C’est donc tenir pour acquis que l’égalité entre les hommes et les femmes est atteinte, voire même que les femmes domineraient actuellement la société au détriment des hommes. Leur discours, qui peut sembler en apparence être un d’égalité, se fonde alors sur une prémisse fallacieuse.

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Une place parmi les meilleurs vendeurs des essais québécois

La réédition de l’ouvrage collectif Le mouvement masculiniste au Québec s’est hissé au dixième rang des essais québécois les plus vendus selon le Palmarès Gaspard/Le Devoir pour la semaine du 8 au 14 juin 2015, puis pour celle du 6 au 12 juillet 2015. Il a, par la suite, atteint le neuvième rang du 20 au 26 juillet 2015.

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Mise à jour nécessaire sur le masculinisme

On sait qu’il existe, mais on en imagine difficilement l’ampleur. On sait aussi qu’il ne s’agit pas d’un mouvement visant à se pencher sur la condition masculine en vue d’une plus grande égalité entre les sexes, mais d’un contremouvement strictement intéressé à préserver les privilèges masculins. Surtout, avec Le mouvement masculiniste au Québec – L’antiféminisme démasqué, on comprend qu’il a toujours existé et qu’il nous guette à tout moment.

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