Inscrits dans la veine des récits de la grève, deux ouvrages publiés à l’automne 2013 retiennent l’attention. Le premier, Tenir tête, analyse la lutte du point de vue d’un de ses principaux protagonistes, le leader étudiant Gabriel Nadeau-Dubois. Le second, Les femmes changent la lutte, est un ouvrage collectif qui rassemble des contributions sur l’implication des femmes dans la grève. Ces mises en perspective sont des balises indispensables pour mieux comprendre le mouvement des «carrés rouges». Mais elles offrent également un aperçu de la combativité politique d’une nouvelle génération militante. Des points de vue d’autant plus intéressants à lire, alors que la politique d’austérité menée actuellement au Québec suscite une colère grandissante. […]
L’analyse de Camille Tremblay-Fournier est également une critique sévère du milieu étudiant. L’auteure cible en particulier la division du travail militant, et les «mécanismes informels» qui la reproduisent, lors des AG, dans les prises de parole, mais aussi dans la répartition des tâches quotidiennes. Elle procède à un examen critique particulièrement intéressant des métaphores familiales et patriarcales dans les discours militants: ainsi, lors d’une interview, un leader étudiant demande au premier ministre de se comporter «en bon père de famille». Mais plus largement, la solidarité au sein du mouvement se vit souvent comme un rapport d’appartenance familiale, qui place les féministes dans une posture de désolidarisation lorsqu’elles remettent en cause l’ordre militant.
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