Sous le grand chapiteau de l’histoire, la place accordée aux femmes demeure étroite. Pourquoi ne nous parle-t-on jamais chez nous, par exemple, d’Éva Circé-Côté (1871-1949)? Moderne, féministe, antiraciste, descendante en ligne directe de l’esprit des révolutionnaires de 1837-1838, cette femme de feu, tout à fait exceptionnelle, demeure injustement dans son coin d’ombre. À l’historienne Andrée Lévesque revient l’immense mérite d’enfin nous la faire mieux connaître grâce à une riche biographie qui, pour quiconque s’intéresse à la marche des idées, constitue une lecture vraiment incontournable.
Peu douée à l’école des soeurs de Lachine pour la couture, tenue tel un enseignement fondamental pour les jeunes filles, Éva Circé montre en revanche d’excellentes aptitudes en français et, bientôt, une soif de lectures qui l’encourage à meubler les formes du langage d’idées nouvelles et généreuses. Elle a la vingtaine lorsqu’elle approche les poètes et les artistes de Montréal, tous des hommes qui se réunissent alors dans des cercles fermés.[…]