Entrevue avec Gabrielle Richard : hétéro, l’école?

[Julie Vaillancourt] À travers le livre tu explores la façon dont on parle de sexualité dans les écoles du Québec et en France. Essentiellement, des valeurs hétéronormatives, la bonne manière d’être une fille ou un garçon. Au Québec, le programme récent d’éducation à la sexualité fait polémique. Qu’en penses-tu?

[Gabrielle Richard] La façon de présenter le programme est un peu maladroite. C’est, en quelque sorte, un programme de compromis. Orientation sexuelle et identité de genre viennent assez tardivement, en première secondaire. Dès la puberté, le discours est très binaire, genré, alors qu’on pourrait présenter cette période autrement; par exemple, des poils vont pousser, l’excitation sexuelle prend de l’expansion, etc. Tout cela dans un contexte où nos profs ne sont pas nécessairement formés. Ainsi, ils vont opter pour ce qu’ils connaissent, ce que je ne blâme pas, ils ont déjà beaucoup de travail. Le problème initial est un manque de ressources. Le programme spécifie qu’il appartient aux écoles de choisir les modalités, tant qu’on enseigne le sujet quinze heures par année, au secondaire. (En France, c’est trois heures, seulement!) Cela dit, le constat demeure le même: pas assez de temps! Pour être le plus efficace possible, on privilégie la protection liée aux rapports (hétéros)sexuels (grossesse et ITS). La sexualité devrait être une priorité. Et par sexualité, on n’entend pas uniquement avoir des rapports sexuels, mais tout le rapport à son propre corps, le consentement, les rapports à l’autre, etc.